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Montréal le 8 décembre 2014 ─ La Conférence des juges administratifs du Québec (CJAQ) vient de prendre connaissance du Projet de loi no 393 déposé jeudi le 4 décembre 2014 à l’Assemblée nationale par le député de Deux-Montagnes, monsieur Benoît Charrette de la Coalition Avenir Québec (CAQ). Ce projet de loi vise à encadrer la nomination de certains titulaires d’emplois supérieurs et à uniformiser certains aspects de la nomination des juges administratifs.

La CJAQ accueille favorablement la volonté de la CAQ d’améliorer les critères de sélection des juges administratifs et de faire en sorte que tant le processus de nomination, que celui du renouvellement des mandats de ces derniers soient soustraits à toute influence partisane.

Ces principes rejoignent la position défendue par la CJAQ depuis de nombreuses années et sont en accord avec les recommandations du rapport intitulé : La justice administrative : entre indépendance et responsabilité[1] (le rapport des chercheurs universitaires), publié en février 2014, sur lequel, le projet de loi de la CAQ prétend s’appuyer.

Toutefois l’article 23 du projet de loi qui prévoit que le mandat d’un juge administratif aura une durée initiale de quatre années, mais ne pourra être renouvelé qu’une seule fois, pour une autre période de quatre années suscite de vives critiques de la part des juges administratifs et est contraire aux recommandations des chercheurs universitaires.

Si ce projet devenait loi, 70 % de tous les juges administratifs du Québec deviendraient inéligibles à l’exercice de leur fonction. Ce serait une perte considérable de savoir et de compétence au sein de chacun de ces tribunaux et la direction actuelle de tous les tribunaux serait littéralement amputée de tous ses titulaires, puisque ces derniers sont normalement choisis parmi les juges administratifs qui composent le tribunal, justement parce qu’ils ont acquis une bonne expérience des rouages du tribunal, qui ne s’acquière qu’avec les années.

De transformer la fonction de juge administratif en un emploi précaire d’une durée maximale de huit années aura pour effet de décourager un grand nombre de postulants compétents, qui dans bien des cas, ne peuvent mettre en veilleuse une carrière ou l’exercice d’une profession, pour la reprendre après coup. L’inamovibilité fait partie des trois piliers de l’indépendance judiciaire et cette proposition de la CAQ contrevient sérieusement à ce principe.

La CJAQ est d’avis qu’un dialogue doit rapidement s’engager pour réformer la justice administrative au Québec. Ce dialogue doit se faire en consultation avec les représentants des juges administratifs des différents tribunaux et la direction de ces mêmes tribunaux administratifs afin que la classe politique saisisse bien leurs enjeux et leurs besoins afin d’assurer aux justiciables une justice administrative indépendante, impartiale et de qualité.

À cette fin, la CJAQ a déjà rencontré la ministre de la justice, madame Stéphanie Vallée et poursuivra ses démarches auprès du gouvernement au cours des prochains mois. Également, la CJAQ demandera sous peu de rencontrer les responsables politiques des autres partis, afin de les sensibiliser à sa position sur ces questions.

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[1] P. NOREAU, M. VALOIS, F. HOULE et P. ISSALYS, « La justice administrative : entre indépendance et responsabilité », Montréal, 2014, Les Éditions Yvon Blais.